
Introduction
Décédé le 8 février 2025, Sam NUJOMA aura marqué le continent africain par son engagement pour l’indépendance de la Namibie et, la libération totale de l’Afrique de toute forme de domination. Personnage très charismatique, mais peu connu ou médiatisé comme d’autres figures emblématiques de l’anticolonialisme, l’anti-impérialisme, de la lutte contre l’apartheid et du Panafricanisme, tels Robert MUGABE et le très célèbre Nelson MANDELA, Sam NUJOMA n’en n’est pas moins important. En effet, il fut le chef du mouvement de libération nationale de la Namibie, la SWAPO, en vertu du droit fondamental des peuples à disposer d’eux-mêmes. Son organisation conduira le pays à l’indépendance le 21 mars 1990. Si aujourd’hui, la Namibie bénéficie depuis son accession à l’indépendance, d’une stabilité politique consolidée et d’un fort ancrage démocratique, chose rare sur le continent africain, c’est aussi le fruit de son travail politique. Dans ce portrait qui lui est dédié, nous retracerons le parcours de ce grand homme, de sa jeunesse à l’héritage qu’il a légué à la Namibie.
Jeunesse et Education
Samuel Shafiishuna Daniel NUJOMA, né le 12 mai 1929 dans une famille modeste à Ongandjera, une localité dans ce qui s’appelait à l’époque le Sud-Ouest africain (actuelle Namibie), une ex-colonie allemande, confiée à la tutelle de l’Afrique du Sud (Etat colonial) par un mandat de la Société des Nations (SDN), ancêtre de l’ONU. Conséquence logique de la défaite de l’Allemagne lors de la première guerre mondiale. Sam NUJOMA a grandi en aidant ses parents avec les tâches domestiques et le pastoralisme. Malgré des ressources limitées, il a fréquenté l’école primaire Augustineum à Ongwediva. À 17 ans, il quitte sa ville natale pour trouver du travail dans la ville portuaire de Walvis Bay, où il sera exposé pour la première fois, aux injustices de l’apartheid et à la ségrégation raciale imposée par le régime sud-africain.
Eveil Politique et Activisme
Son éveil politique naît lorsqu’il a rejoint les syndicats des travailleurs du rail, dans lequel il milite ouvertement pour les droits des ouvriers noirs. En 1959, il co-fonde l’Organisation du peuple de l’Ovamboland (OPO) pour lutter contre l’injustice sociale et économique. L’année suivante, l’OPO se transforme en Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (SWAPO), avec l’objectif de libérer la Namibie de la domination coloniale sud-africaine.
Exil et Lutte armée
En 1960, Nujoma est contraint à l’exil en 1960, au Botswana, Ghana et aux Etats-Unis d’Amérique sans son épouse et leurs enfants. Mais cet exil ne l’empêchera pas de diriger la SWAPO. Pendant les années 1960, la SWAPO obtient le soutien de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) et de nombreux pays du bloc de l’Est en Particulier Cuba. Fort de ces différents soutiens, NUJOMA lance la lutte armée en 1966, menée par l’Armée populaire de libération de Namibie (PLAN). Cette guerre de libération, marquée par de nombreuses batailles et une forte répression, durera plus de deux décennies et fera plus 20.000 morts. Même si la lutte armée ne parvient à libérer aucun territoire par la guérilla, elle réussit néanmoins, à attirer l’attention de la communauté internationale sur la situation de la Namibie. Pavant ainsi, la voie à la longue marche vers l’indépendance.
Le chemin vers l’indépendance
Grâce aux efforts incessants de NUJOMA et de la SWAPO ainsi que de l’OUA, l’Assemblée générale des Nations Unies reconnaîtra enfin en 1973, la SWAPO comme seul représentant légitime du peuple namibien. En 1978, le Conseil de sécurité des Nations-Unies adopta la Résolution 435 qui, prévoyait à terme l’indépendance de la Namibie. Asphyxié économiquement par l’embargo dont il faisait l’objet et affaibli militairement par sa guerre contre le régime marxiste-léniniste Angolais, appuyé par Cuba, le régime raciste d’apartheid se résout à entamer des négociations avec la SWAPO dans les années 1980. C’est ainsi que le régime d’apartheid qui avait rejeté la résolution 435 du Conseil de sécurité des Nations-Unies dès son adoption, l’accepta finalement en 1988. En septembre 1989, après quasiment trente années d’exil, NUJOMA rentre en Namibie pour mener la SWAPO à la victoire lors des élections organisées sous le contrôle de l’ONU, en novembre. La SWAPO remporte une victoire écrasante et Sam NUJOMA est élu premier président de la Namibie. Le jour même de l’indépendance de la Namibie, le 21 mars 1990, il prête serment et est investi président.
Présidence et réformes
Durant ses mandats présidentiels (1990-2005), Nujoma mettra en place plusieurs réformes politiques, économiques et sociales. Il promeut l’unité nationale, la réconciliation et la reconstruction post-conflit. Sous sa direction, la Namibie adopte une constitution progressiste, protège les droits humains et encourage le développement économique et social.
Impact et Héritage
Sam NUJOMA est vénéré comme le père de la nation namibienne. Son rôle dans la libération du pays et la construction d’une société indépendante et démocratique reste inestimable. Il est l’auteur de son autobiographie, « Where Others Wavered », qui narre ses expériences et sa vision de la libération.
Après sa retraite politique en 2005, il continue à être une figure influente et respectée en Namibie et au-delà. En reconnaissance de ses contributions, il reçoit de nombreuses distinctions internationales, dont le Prix de la Paix Lénine et le Prix de la Paix Indira Gandhi. Sam NUJOMA s’éteint le 8 février 2025, laissant derrière lui un héritage de résistance, de leadership et d’engagement envers la justice sociale et pour la cause panafricaine. Des qualités dont l’Afrique ne peut en faire l’économie, tant les défis actuels et futurs sont importants.
Rédigé par Cyrille Ange BADO